Gabriel Fauré
Jardin nocturne
Nocturne jardin tout empli de silence
Voici que la lune ouverte se balance
En des voiles d'or fluides et légers;
Elle semble proche et cependant lointaine...
Son visage rit au cœur de la fontaine
Et l’ombre pâlit sous les noirs orangers

Nul bruit, si ce n'est le faible bruit de l'onde
Fuyant goutte à goutte au bord des vasques rondes
Ou le blеu frisson d’une brise d'été
Furtive parmi dеs palmes invisibles...
Je sais, ô jardin, vos caresses sensibles
Et votre languide et chaude volupté!

Je sais votre paix délectable et morose
Vos parfums d'iris, de jasmins et de roses
Vos charmes troublés de désirs et d'ennui...
Ô jardin muet ! -- L'eau des vasques s'égoutte
Avec un bruit faible et magique... J'écoute
Ce baiser qui chante aux lèvres de la Nuit