Taïro
D’où on vient
[Couplet 1]
Ils m'ont dit, ton mode Hamas Fatah, on n'aime pas ça
Chante la vie d’château ou fait de la bachata
Ça t'empêche pas de chômer d'être bachelier
La galère a ses tauliers, l'horizon s'arrête au bout de l'atelier
Jeune fille t'es pas prête pour le dirty dancing d'une dancehall queen
Ici la toxicomanie est une sorte de médecine
En juin, 300 kilos de bédo se font péter
Ça risque d'être un peu tendu dans la région cet été
Pour l'intégration médiatique, les MC crachent sur les tours
Habillés de veste en velours, s'inventent un amour pour Aznavour
Gros qu'est-ce qui t'arrive?
C'est quoi cette batterie et ce guitariste?
OK, on évitera d'en parler si on en a l'occase
Ils veulent blanchir le truc, pur hip-hop pour eux c'est naze
Attention, ils voudraient faire au rap ce qu'ils ont fait au jazz
Il y a quelque chose de létal dans leur méthode
Alors, nos cultures comme des coffres-forts, on préserve nos codes

[Refrain: Taïro]
Qu'on soit refait, qu'on soit en chien
Dans les Clios, sur les R1
Du crépuscule jusqu'au matin
À chaque couplet, à chaque refrain
Du commencement jusqu'à la fin
Ça s'en va et ça revient
Les wesh ma gueule, bien ou bien
Mais on se souvient d'où on vient

[Couplet 2]
Les envies d’réussir fulgurantes mais surtout concurrentes
Nos comptes courants empestent la boule puante
L'esprit néo-colonialiste frappe du matin au soir
À travers ces banlieues que hantent les fantômes de l'Histoire
Les trottoirs parlent à travers nous comme des ventriloques
Nos espoirs rêvent de flots bleus sur lesquels on vogue en pirogue
Ni la synagogue, ni la mosquée, ni l'église n'ont d'emprise
On veut pas attendre pour le paradis, c'est beaucoup par fainéantise
Dans une cage, pas évident d’cogiter
Certains jeunes rêvent d'être de ces endroits dont on parle au JT
Dans la complexité, on a vu naître le complexe de la petite cité
Pas besoin d'être Einstein
Des frustrations se clashent derrière des punchlines
Il faut pouvoir assumer l'endroit d'où l'on vient, même si ça peut faire pâlir
Moi je connais des types qui n’savent pas lire
Ouais, tu considères que mon état d'esprit me retarde
Et si t'allais niquer ta mère, moi j’rappe comme tu m’regardes

[Refrain]

[Couplet 3]
Ça va pas leur plaire, j'insiste, Kertudo m'a dit
Qu'en distribuant mon disque, il prenait un risque
L'indice de mes ventes suit courbe inverse de celui de mon seum
Je paye le loyer de mon teum-teum, que le game aille niquer sa reum
Je kicke, y a rien de glorieux, mais y a rien dont je puisse être honteux
Sur scène je rappe, te regardant droit dans les yeux
Tel le condé te shootant au taser, descendant de tirailleur
Tiraillé entre le métronome et le fusil mitrailleur
Tu t'es fait mettre à l'amende par un renoi comme Mitt Romney
Alors tu t'es souvenu des trucs que Jean-Marie Le Pen disait
L'esprit de Stokely Carmichael me possédait
Chaque fois qu’j’me suis senti dans la peau de King Rodney
Vouloir tout ramener qu'à une lutte des classes c'est un non-sens
Une vision ethnocentrique blanche de ceux qui n'ont pas conscience
Des combats dont la couleur de leur peau les dispense
Dont la couleur de leur peau les dispense

[Refrain]