Pierre Perret
Jeanne
Le ruban se déroule sous mon camion pourri
J'écoute les infos en tétant ma gitane
Des guerres et des famines, des morts, des maladies
J'aime bien mieux rêver aux jolis seins de Jeanne
Je sens d'ici l'arôme du petit expresso
Qu'en arrivant, toute nue sous sa chemise persanne
Elle m'offrira avec ses petits pains tout chauds
Le mien durcit déjà, rien qu'en pensant à Jeanne

La campagne s'éveille. On voit des tas d'oiseaux
Au dessus d'un mulot, déjà, la buse plane
Le bâton du berger rassemble son troupeau
Le mien sera bientôt entre les doigts de Jeanne
De la poste centrale, s'échappent des facteurs
Jardin du Luxembourg, on attèle les ânes
Le métro du matin charrie ses voyageurs
Moi, j'ai qu'une station : c'est dans les bras de Jeanne

Pour la vingt-huitième fois on viole un cessez-le-feu
Un président s'envole sur son aéroplane
Au bureau du chomdu, il y a déjà la queue
À l'heure où l' PDG fume son premier havane
J'ai garé mon gros cul parking des coquelicots
Où y a rien qu' du béton et des bagnoles en panne
Des gus pleins de cambouis mettent le nez sous l' capot
Moi, j' vais enfouir le mien dans la toison de Jeanne

Je grimpe l'escalier. Mon palpitant bat fort
Il flotte autour du lit des senteurs océanes
Je laisse tomber l' café pour une bouée d' secours
Que mes bras font autour de la croupe de Jeanne
En bas de l' HLM, on se balade en short
Nos voisins finissent de briquer leur caravane
Ils se tirent en vacances pour changer de décor
À l'heure où retentit le cri d'amour de Jeanne